Il était arrivé en fin de matinée dans la ville, avait observé les environs avec des étoiles dans les yeux - les rues même pas trop verglacées, la neige sur les toits, les gens qui grouillaient dans les rues. Oui, il savait que ça faisait campagnard tout juste débarqué, mais bon, hein, techniquement, il débarquait en effet tout juste de sa campagne natale, alors autant prendre ça comme un fait plus que comme une insulte.
N'empêche qu'il n'avait pas trop le temps de jouer les touristes, aussi tentante soit la perspective. De base, il était venu pour faire ses premiers pas en tant que mercenaire, pas pour bailler aux corneilles. L'adolescent avait donc pris le temps de poser ses affaires, de se rendre un peu présentable et de se vérifier la localisation exacte de la boutique histoire de ne pas zigzaguer lamentablement dans les rues. Après un peu de marche rapide, la vitrine regorgeant de merveilles d'or, d'argent, de platine et de gemme s'était détachée, entre des devantures de riches tissus et des têtes aux coiffures complexes.
D'ailleurs, les tenues de tout le petit monde se pressant dans la boutique firent réaliser à Mordred que, s'il était habillé tout à fait correctement et sans faux plis, même, il trancherait tout de même dans la clientèle, si tant est que le gardien le laisse entrer. Un peu de réflexion s'imposait. Il pouvait bien montrer la lettre de recommandation au planton, mais celui-ci risquait de tout de même l'envoyer balader. Tiens, d'ailleurs il avait oublié de demander à qui il présentait ladite lettre. Il aviserait une fois rentré discrètement, vu qu'il semblait qu'il doive en passer par là. Encore heureux, il n'avait pas emporté pour une première rencontre le sabre, qui aurait fait encore moins discret. Profitant de l'arrivée d'un groupe de jeunes filles qui caquetaient un peu et gloussaient beaucoup -des filles, quoi- escortées de porteurs pour leurs divers colis, il se glissa en périphérie de la petite troupe, dissimulé au regard du garde, et entra avec la masse riante.
Bon, première étape, c'était bon. Deuxième étape, prise de contact. Sauf que le monde aidant, il y avait foule autour du comptoir, et interrompre le vendeur pour lui signaler qu'on venait l'aider... bah ça semblait moyen moyen, quand même, un peu. Il attendait une accalmie quand un second mercenaire vint à sa rencontre, avec le genre d'attitude qui incitait à la prudence - pas que le père de Mordred ne lui ai pas déjà fait le coup du regard sévère, mais c'était indémodable.
"Eh bien... Mon père m'envoie auprès des Girier pour devenir mercenaire, et j'ai une lettre de recommandation, mais je ne sais pas exactement à qui je suis censé la remettre."