- Le lendemain de l'arrivée de la dernière mission -
Arthon venait d'apprendre de graves nouvelles. Les missions ne lui avaient pas laissé un moment à lui depuis qu'elles étaient rentrées. Il fallait organiser les comptes rendus, vérifier qu'aucun participant n'était trop gravement malade, qu'ils ne ramenaient pas d'étranges choses incompréhensibles (et bien sûr, ils avaient tous trouvé des choses étranges à ramener, surtout la dernière mission... ), s'assurer que les nouveaux ambassadeurs n'étaient pas des traîtres et trouver donc un moyen politiquement correct de les soumettre à l'Enchantement de Vérité, vérifier de même qu'ils puissent participer aux Conseils sans intérêts contraires vis à vis de leurs pays, réparer les gaffes inévitables de protocoles... En plus de faire toutes les choses qu'Uriens faisait habituellement et qu'Arthon aurait préféré lui laisser.
Sauf qu'Uriens récupérait doucement à la Maison de la Guérison et qu'il ne pouvait pas trop aider son fils, qui rechignait à lui soumettre trop de problèmes de peur d'enrayer le processus de guérison. Il aurait bien voulu qu'Aranel soit à ses côtés, mais elle aussi était dans un état plus que lamentable.
Depuis son arrivée, elle avait ... dormi. D'abord avec de la fièvre et des hallucinations, puis, aidée par les drogues et les Guérisseurs, plus calmement et profondément. On aurait presque dit un coma si elle ne se réveillait pas pour manger et les besoins naturels.
Arthon s'inquiétait énormément pour son amie. Déjà quand elle était partie avec les missions, elle avait des cernes assez prononcées mais elle gérait. Quand elle était revenue, c'était d'urgence qu'on l'avait conduite à l'infirmerie. Ses compagnons de voyage avaient avoué qu'elle s'était renfermée au cours de la mission, de plus en plus épuisée et incapable d'aider. C'était tout le contraire de l'Aranel que connaissait l'Héritier.
Il n'avait pas eu le temps de venir la voir trop souvent, et ses rares visites étaient tombées pendant des périodes de sommeil. Cette fois-ci, il avait été appelé par les Guérisseurs. Il sortait d'un entretien avec l'un d'eux quand il se rendit dans la chambre d'Aranel.
Cette fois, elle était réveillée. Amaigrie, blanche comme un linge, elle faisait peur à voir. Son Compagnon, qu'on avait mis à l'abri d'une tente collée à la fenêtre pour qu'il puisse la voir et la toucher en passant la tête, semblait lui-même dans un état lamentable. Arthon comprit subitement que le Guérisseur avait vu juste.
Il s'approcha du Héraut du Roi et lui baisa le front d'un geste fraternel:
" Bonjour Aranel... Comment te sens-tu aujourd'hui?"
Il avait beaucoup de questions à lui poser, et il fallait qu'elle sache quel traitement l'attendait.